Gluten, œuf, arachide poisson, cacahuètes, fraise ou kiwi. Ces mots sont devenus des menaces pour notre santé. Le consommateur scrute les étiquettes à la recherche de « blé », « lait », ou « œufs ».

Les produits sans gluten ont envahi les rayons. Les cartes des restaurants proposent des plats sans arachide ou sans lait.

Les parents demandent que l’on serve des menus sans œuf à leur enfant à la cantine. Serions-nous tous devenus allergiques ?

Une explosion des allergies alimentaires ?

Sommes-nous donc intolérants à tout ce qu’on pourrait mettre dans notre assiette ?

A voir ce qui se passe, on a bien envie de le penser. Serions-nous tous devenus allergiques ?

D’abord, mettons les choses au clair. Qu’est-ce qu’une allergie alimentaire ?

Une VRAIE allergie alimentaire, au sens médical du terme, est une réaction qui met en jeu le système immunitaire de l’organisme.

C’est une réaction anormale : l’organisme considère un aliment comme dangereux.

Il met en route ses systèmes de défense pour neutraliser l’agresseur.

Les symptômes sont souvent légers : démangeaisons, éruptions cutanées ou encore une sensation de brûlure ou de picotement sur les lèvres.

Ces réactions sont médiées par des immunoglobulines de type E, les IgE. Ces anticorps, quand ils rencontrent un allergène spécifique, provoquent la libération massive de médiateurs chimiques, l’histamine par exemple.

Ce sont ces médiateurs qui sont responsables des symptômes de l’allergie.

Plus rarement, l’allergie peut être très grave et entrainer des difficultés respiratoires, voire un choc anaphylactique. Le traitement est alors une urgence.

Mais restons calme !

C’est exceptionnel. Dans la plupart des cas, ces personnes se savent allergiques. Les accidents peuvent être prévenus.

Un allergique a souvent un de ses parents, voire les deux, qui sont déjà allergiques.

Ou bien il souffre d’autres manifestations de l’allergie, comme une dermatite atopique.

Les vrais chiffres

Des études ont montré que les allergies alimentaires avaient doublé en cinq ans. Elles toucheraient en moyenne 4% des adultes et 8% des enfants en France. Bien moins que ce que laisse penser le discours ambiant.

Qui ne connait pas un ami, un proche, un collègue, qui se dit allergique à tel ou tel aliment, qui a fait une croix sur la cacahuète, le poisson ou la fraise, qui scrute à la loupe les étiquettes de ce qu’il achète ?

« Je suis allergique ». Mythe ou réalité ??

Attention, il ne s’agit pas de déclarer que tous ceux-là sont des menteurs ou des hypochondriaques. Il est fréquent de ressentir des symptômes d’irritations, des maux de ventre ou encore d’avoir quelques petits boutons après ingestion de tel ou tel aliment.

Mais dans la plupart des cas, il s’agit d’une intolérance, pas d’une allergie alimentaire.

On dénombre une seule allergie vraie pour 4 intolérances alimentaires… En mimant les symptômes allergiques, ces dernières prêtent souvent à confusion.

Allergie ou intolérance ?

Contrairement à l’allergie alimentaire, l’intolérance alimentaire n’implique pas le système immunitaire. Elle apparait souvent quand le système digestif a du mal à digérer un aliment ou un de ses composants.

Par exemple, dans l’intolérance au lactose, l’organisme ne produit pas suffisamment de lactase. La lactase est l’enzyme chargée de digérer le lactose.

L’intolérance n’est pas déclenchée par une protéine, à la différence de l’allergie. Tous les composants d’un aliment peuvent déclencher une intolérance.

Voilà pourquoi le plus souvent, un inconfort digestif ou des petits picotements sont le signe d’une intolérance alimentaire et non d’une allergie !

Les symptômes d’une intolérance sont bien plus variés que ceux d‘une authentique allergie : douleurs abdominales, flatulences, nausées, diarrhées, mais aussi fatigue, irritabilité, mal de tête et éruption cutanée.

C’est facile de comprendre qu’il est difficile de diagnostiquer une intolérance, mais aussi que de plus en plus de gens se déclarent allergiques alors qu’il ne s’agit « que » d’une intolérance alimentaire.

« Faux allergiques », attention danger

Le problème, c’est que ces pseudos allergiques s’auto-soignent en adoptant un régime d’exclusion. Ils font une croix sur les aliments auxquels ils se croient allergiques. « Je ne mange plus de pain, plus de fruits, plus de poisson, plus de moutarde ».

Que reste-t-il ?

Celui qui ne supporte pas les œufs les bannit de son alimentation. Celui qui croit ne pas supporter le lait tire un trait sur les yaourts, le fromage, les crèmes desserts…

Comment avoir une vie sociale avec tout ça ?

En plus, c’est la porte ouverte aux déséquilibres alimentaires. A la clé : prise ou perte de poids, fatigues carence multiples, manque de fer, de protéines, de vitamines de minéraux, …

Bref, manque de tout ce que contiennent les aliments que le pseudo allergique a banni de son alimentation.

C’est là que ça se complique. Car une fois que l’on a supprimé un aliment auquel on croyait être allergique, il est très difficile pour le médecin de savoir si oui ou non on est VRAIMENT allergique. Et c’est le cercle infernal…

En plus, en excluant une ou plusieurs catégories d’aliments, ces régimes d’exclusion entrainent des déséquilibres alimentaires. Manque de protéines, de vitamines, d’acides gras essentiels ou encore de fer…

Plus de mal que de bien.

Ces déséquilibres sont encore plus préjudiciables si la personne est enceinte ou si c’est un enfant en pleine croissance.

En pratique, que faire ?

Si vous pensez présenter une allergie alimentaire, la première chose à faire est de consulter votre médecin. Ne commencez pas à jouer aux marabouts avec le contenu de votre assiette.

Tout régime d’exclusion doit être suivi par un médecin ou un diététicien. Lui seul peut évaluer les risques de carences nutritionnelles, proposer des aliments alternatifs équivalents et prescrire si nécessaire des suppléments en vitamines, minéraux ou oligo-éléments.

S’il s’agit bien d’une authentique allergie, vous serez donc orienté vers un spécialiste, allergologue le plus souvent. Sa mission est de lister les allergènes à éviter.

Une diététicienne vous aidera en vous proposant des menus adaptés et des idées en cuisine.  Passer de la théorie à la pratique. Une démarche essentielle pour se sentir à l’aise face à l’allergie !

On vous indiquera ce que vous pouvez ou non consommer, les précautions à prendre et la conduite à tenir en cas d’exposition à l’aliment auquel vous êtes allergiques.

Il faut alors revoir de fond en comble ses habitudes alimentaires et le contenu de ses placards.

Rassurez-vous, on peut manger bien, équilibré et savoureux avec un, et même plusieurs allergies alimentaires.

Mais si, comme c’est le plus souvent le cas, il s’agit d’une intolérance, une simple adaptation de votre mode de vie et de votre alimentation sera suffisante pour limiter les symptômes.

Pas question d’exclure totalement tel ou tel aliment.

Bien plus agréable et bien meilleur pour votre santé que d’adopter des régimes draconiens pour une maladie imaginaire !

N’oubliez pas que souvent, derrière une pseudo intolérance ou allergie alimentaire, se cache un mythe, une croyance erronée sur l’aliment en question.

Consultez d’abord un professionnel de santé, médecin, diététicien, nutritionniste.

Vous lui exposerez précisément les symptômes, les circonstances de l’apparition, les aliments que vous suspectez….

Pour votre morale et votre santé, il est bien plus importante de poser un diagnostic que de chambouler toute votre alimentation pour rien !

Vous vous en porterez bien mieux …..

Docteur Pradère, Médecin en santé Publique